Il y a quelques temps, j’ai eu une idée, une de plus, en bonne HP/TDAH que je suis…
Et j’ai décidé d’interviewer des adultes atypiques, mais aussi des adolescents et même des enfants, pour mettre en lumière des vécus et permettre à d’autres de s’identifier, de se découvrir, de comprendre le fonctionnement neuroatypique, de sortir du déni parfois, de l’ignorance aussi…
Voici donc le premier témoignage d’une adulte TDAH et comment cela s’est fait…
Rien n’arrive par hasard…
Il y a quelques semaines, une amie m’a parlé d’un cours d’athlétisme tout près de chez moi qui accueillait des enfants porteurs de handicap, comme l’autisme.
Son petit bonhomme extraordinaire, autiste non verbal, y est inscrit comme deux autres autistes.
Quelques jours plus tard, le prof de sport de mon fils lui suggérait de faire de l’athlétisme…
Nous voilà donc partis pour un essai et moi de prévenir la responsable que mon loulou était TDAH sous traitement, ce à quoi elle a répondu : « moi aussi ».
Je vous présente Katia Hirtz grâce à qui ces enfants atypiques peuvent faire de l’athlétisme, car c’est elle qui les encadre!
Et qu’elle estime que leur inclusion est bénéfique pour tous ❤️
Coucou Katia…
? Peux-tu nous dire en quelques mots qui tu es…ce que tu fais dans la vie…
Nous brosser ton portrait.
« J’ai 43 ans, j’adore la course à pied, le bricolage, la nature et les animaux.
J’ai pratiqué la course à pied assez intensément ces 3 dernières années, mais depuis 8 mois des problèmes de santé font que je ne peux plus courir au même niveau qu’avant.
Je suis présidente d’un club d’athlétisme qui accueille pas moins de 68 jeunes de 3 à 16 ans.
J’entraîne des groupes 4x dans la semaine. Je suis entièrement bénévole pour cela.
Lorsque la santé me le permet je travaille…
Je suis secrétaire/comptable à la base mais avec mes problèmes de mémoire, d’organisation et de concentration je n’ai jamais pu exercer ce métier.
Récemment, j’ai travaillé 6 mois dans une entreprise adapté, où j’étais affectée à l’atelier menuiserie.
J’ai eu des emplois contractuels au sein de ma commune, Niederbronn-les-Bains, où j’habite.
J’y ai fait le travail d’agent recenseur (c’était comique avec mes troubles, j’ai cru que je n’allais pas finir et pourtant si ?),j’ai également travaillé au mini golf et à la piscine municipale.
Actuellement je participe à la récolte du Raifort dans une exploitation agricole qui se trouve à Mietesheim.
?As-tu des enfants?
« Oui j’ai 5 enfants. 3 filles et 2 garçons, de 13 à 23 ans »
? Tu me confiais quand on s’est rencontrée que tu étais TDAH et bipolaire.
As-tu un TDAH combiné avec hyperactivité et impulsivité ?
« Oui mon TDAH est combiné avec une forte hyperactivité et également une impulsivité qui me cause de nombreux soucis»
?Comment l’as-tu découvert?
Et quand?
« J’ai toujours eu des symptômes d’hyperactivité et d’impulsivité depuis ma jeunesse, mais à l’époque je n’étais pas suivie.
J’ai été diagnostiqué à la fin d’une très longue hospitalisation il y a 9 ans, en psychiatrie, qui a duré 2 ans 1/2 au total »
?Qu’est-ce que le diagnostic t’a apporté ?
Et es-tu sous traitement médicamenteux ?
« Le diagnostic m’a appris à mieux comprendre la maladie, à reconnaître les signes avant-coureurs.
Je suis sous traitement médicamenteux de méthylphénidate pour atténuer les symptômes »
?Comment vis-tu avec ton TDAH ?
« Je vis assez mal mon TDAH, mais en même temps je suis fière d’arriver à contourner tous les problèmes qu’il engendre, grâce à des stratégies que j’ai mises en place. »
? Comment est-il perçu et vécu par tes proches?
« J’ai des enfants et un mari extraordinaires, très conciliants. Avec eux je n’ai aucune crainte d’être jugée, mise à l’écart, ils connaissent mes faiblesses et mes forces.
Chez nous on prend le TDAH et la bipolarité avec légèreté, on en rit sans pour autant en sous-estimer les conséquences »
? Penses-tu que c’est une force ou un handicap, invisible?
« J’adore défier mes limites, me dire que je suis plus forte que mes troubles.
J’y arrive même très souvent et nombre de mes soignants sont impressionnés par ce que j’arrive à accomplir malgré mes difficultés.
Je fais tout cela sans que la plupart des gens ne me connaissent vraiment.
Je suis au milieu d’eux, je n’en parle pas, mon trouble n’est pas affiché sur mon front.
Personne ne se doute de toute l’énergie que je dois déployer pour arriver à faire certaines choses.
Là, c’est le côté négatif d’avoir un handicap invisible.
S’entendre dire « tout le monde a des hauts et des bas » est la phrase qui me gonfle par excellence!
Je ne réponds jamais, mais je devrais répondre par « tout le monde peut avoir des hauts et des bas, mais tous les gens n’ont pas envie de se jeter sous un train lorsqu’ils sont en bas»
Les gens sont plus bienveillants, plus ouverts avec une personne en fauteuil roulant par exemple… »
? As-tu une RQTH (reconnaissance travailleur handicapé)
« Oui, j’ai la RQTH »
?La bi-polarité est souvent une des commorbidités du TDAH…
Peux-tu nous en parler?
« Si je pouvais choisir d’éliminer 1 seule chose, entre TDAH et Bipolarité, je choisirais sans hésiter la Bipolarité.
Ma bipolarité est assez difficile à gérer car j’ai une vie assez remplie et des fois j’ai envie de faire des choses, mais n’y arrive pas. Et ce n’est pas faute d’avoir essayé…
Je bascule entre des phases de manies pendant lesquelles je suis -super Katia- qui court à droite à gauche, qui a mille idées (pas toujours de génie) à la seconde, et qui chante du matin ou soir.
Puis, au milieu de tout ce désordre artistique cérébral, viennent les phases dépressives.
Durant mes phases dépressives je n’ai plus aucune envie. Chaque tâche quotidienne me demande une énergie énorme. Parfois même se lever pour aller s’habiller est un parcours du combattant.
Ces phases là je les déteste.
Je ne sais pas quand elles vont arriver et encore moins quand elles vont finir.
C’est également la phase où je me mets le plus en danger.
La phase à cause de laquelle j’ai faillis mourir plus d’une fois…
Je ne suis pas sûre, mais je crois que d’être à la fois bipolaire et d’avoir un TDAH est une aide.
Le côté actif boost mon côté dépressif.
Il lui dit « vas-y tu peux le faire, tu as plein de belles choses à accomplir et à terminer»
Effectivement, je pense que si je suis toujours là aujourd’hui, c’est parce que j’ai beaucoup d’amis qui ont toujours un mot gentil pour moi et qui me soutiennent, ne serait-ce que par un message amical.
Une chose est sûre : je n’ai pas le duo gagnant avec 2 troubles si différents l’un de l’autre à devoir soigner »
?Es-tu accompagnée et suivie?
« J’ai une équipe médicale assez conséquente qui me suit :
– un psychiatre pour la psychothérapie
– un psychiatre prescripteur et spécialiste des troubles bipolaire et TDAH (le Pr Bertschy qui travaille avec le Dr Weibel à l’hôpital civil de Strasbourg)
– une psychologue
– une spécialiste en addictions qui me fait de l’acuponcture pour m’aider avec mes problèmes de sommeil et pour me détendre
– une équipe d’infirmiers(ères) qui me suit lors de mes prises en charges à l’hôpital de jour de Haguenau (2 demies journées par semaine)
– 2 infirmières qui se relayent chaque soir pour me faire prendre mon traitement (sinon je ne le prends pas régulièrement) »
?Que penses-tu de notre vision en France par rapport à ces fonctionnements neuroatypiques?
« En France on est clairement en retard sur certains pays!
En France c’est : tous dans le même moule!
Faut surtout pas déborder …
La santé mentale est toujours le dernier maillon de la médecine française. Comme si on pouvait avoir mal à la tête, mais pas DANS sa tête »
?Quels sont tes centres d’intérêts ?
Dans quoi t’épanouis-tu?
« Mis à part le sport, qui est souvent synonyme de performances, j’ai trouvé un vrai centre d’intérêt lorsque je fais du bricolage.
Le tournage sur bois, entre autre, m’épanouit.
Lorsque je bricole, comme je ne reproduis rien, les possibilités sont sans limites.
Tout est ouvert, le mélange de couleurs, le mélange de matériaux.
Créer c’est … inventer, et ça, pour une personne TDAH qui a du mal à travailler comme les autres, c’est juste génial ? »
?Quelles sont tes envies, as-tu des rêves?
« J’aimerai bien travailler à mon compte, c’est à dire pouvoir avancer à mon rythme, et donc m’éviter les angoisses d’avoir des contraintes.
Mon rêve serait d’avoir tout l’outillage nécessaire pour me créer un vrai atelier de tourneur sur bois.
Et ainsi vendre mes créations lors de marchés de Noël, de marchés de l’artisanat ou par internet … »
? Y-a-t-il quelque chose que tu aimerais changer?
« Oui, une seule chose pourrait améliorer mon quotidien : l’ouverture d’esprit…
Souvent (beaucoup trop même), les maladies psychiques sont stigmatisées et la plupart en parle sans savoir »
?Qu’aimerais-tu dire aux personnes qui s’interrogent sur un éventuel TDAH ou une autre pathologie et à celles qui sont diagnostiquées?
« Pour celles qui sont diagnostiquées ce serait de garder espoir et profiter de chaque petit moment simple de bonheur.
Pour les autres ce serait de demander conseils, d’aller voir des personnes qui puissent les guider vers de bons médecins qui connaissent bien le TDAH et qui pourrait les aider. »
?Quelle est ta devise?
« Laisse tes rêves changer la réalité, mais ne laisse pas la réalité changer tes rêves »
Merci Katia pour ta sincérité!
Virginie Bouslama présidente de TypiK’AtypiK
Catégories : Témoignages

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