Nous continuons notre série d’interview d’adultes atypiques…✨
Après avoir présenté Katia, c’est au tour de Géraldine Sohet de se livrer…et elle a des tas de choses à nous dire!✨
J’ai vraiment envie de mettre à l’honneur tous ces adultes atypiques qui se découvrent grâce et à travers leurs enfants!✨
Virginie Bouslama présidente de TypiK’AtypiK
« Coucou Géraldine,
On s’est rencontrée il y a quelques mois autour d’un bon déjeuner, après avoir pris contact sur Linkedin et on s’est tout de suite bien entendue…
Il est vrai que nous avons beaucoup de points en communs!
Tu es entre autre la fondatrice de la communauté Les Femmes Fantastiques!
Et je sais que depuis peu, tu as découvert tes rayures, autrement dit ton haut potentiel et c’est pour cette raison que j’ai eu envie de t’interviewer, mais pas que…
Alors c’est parti !
-Peux-tu te présenter en quelques mots ou lignes…nous dire qui tu es et ce que tu fais…
Tout d’abord merci Virginie de me donner la parole sur cette facette de ma personnalité que je dévoile depuis très peu de temps!
Donc je suis Géraldine, j’ai 38 ans, je suis maman de deux petites filles âgées de 3ans et demi et 6 ans.
J’aime profiter de la vie autour de bons petits plats, avec les personnes qui me sont chères (et qui me manquent beaucoup en ce moment), la curiosité me pousse à m’intéresser à tous les domaines (c’est épuisant) et par-dessus tout j’adore les rencontres humaines.
Je suis entrepreneure et je m’investis dans deux domaines qui me tiennent particulièrement à cœur : pousser les femmes atypiques telles que nous à croire en elles et en leurs capacités et je développe également une entreprise de produits bien-être et santé à base de micro-algue (la spiruline) car je suis une convaincue (tout comme toi) que notre alimentation est notre première médecine… sans parler de son impact sur l’environnement.
-Quel a été ton parcours scolaire et professionnel?
Extrêmement atypique et varié… forcément.
L’école et moi nous n’avons pas été de grandes amies.
Quand je suis rentrée en petite section… j’ai tenu un mois.
J’ai tout de suite trouvé cela sans aucun sens ni intérêt.
C’est ce que j’expliquais à mes parents à seulement 3 ans!
J’ai été ainsi déscolarisée les deux premières années car je ne souhaitais plus y mettre les pieds.
La reprise a été très douloureuse… mais j’ai fini par m’adapter… mais sans jamais m’y plaire.
Dès le départ, j’ai bien senti que je ne rentrais pas du tout dans le moule : ni vis-à-vis des attentes de l’éducation nationale ni dans mes relations avec les autres.
Je n’étais absolument pas exclue du reste de la classe, mais je passais mon temps à prendre sur moi pour essayer de m’intégrer auprès des autres.
Et ce fut une vraie souffrance pour moi.
En CP, mon institutrice a convoqué ma mère pour lui expliquer que j’avançais très vite dans le programme et qu’il allait sûrement falloir me faire sauter une classe.
J’ai finalement attendu jusqu’au CE2 pour passer directement en CM1.
Durant ce parcours, j’étais régulièrement punie pour des remarques insolentes (qui pour moi n’étaient que des pures réflexions innoncentes sorties de mon cerveau qui n’analyse pas les choses de la même façon) et le fait que je témoignais régulièrement mon ennui profond (ma mère m’achetait des cahiers de mots croisés pour m’occuper en classe).
J’ai été pour autant une petite fille modèle durant tout mon parcours en primaire et collège.
Me sentir en permanence à la marge de tout, m’a appris à me taire, et à me faire croire que ma différence était anormale et qu’il me fallait me débrouiller avec ce poids.
Au lycée, j’ai commencé à décrocher. J’arrivais à saturation de tous ces efforts d’adaptation.
En plus cette hyperspécialisation des matières était ingérable pour mon cerveau hyper généraliste… qui s’intéresse à tout… mais se lasse immédiatement dès qu’il a fait le tour d’une matière.
J’ai été pour autant projetée dans une filière scientifique « S »… un calvaire.
J’ai obtenu mon bac malgré tout, grâce aux matières littéraires dans lesquelles j’excellais.
Mon prof principal, au moment de me tendre mon relevé de notes, m’a indiqué que c’était le bac S le plus injuste qu’il n’ait jamais été amené à accorder de toute sa carrière. Grande classe!
Etant donné que je n’avais jamais appris à m’écouter et surtout à me dire que ma différence devait s’exprimer dans un chemin professionnel autre que ceux que l’on nous présente à l’école, j’ai donc continué en sciences, alors que je pleurais en disséquant les grenouilles.
Mes études ont été un échec, du moins c’est comme ça que je l’ai vécu.
Car je ne suis pas du tout sortie avec plein de brillants diplômes et j’ai dû faire face à l’incompréhension de mes proches qui n’arrêtaient pas de me dire que moi, je pouvais réussir dans tout!
Ayant alors l’impression que mon avenir professionnel était réduit à néant, j’ai passé des concours pour intégrer la fonction publique (le fameux grâal de la sécurité de l’emploi) où j’y ai passé 12 ans.
En 12 ans… j’ai occupé 7 postes ! Je ne tenais pas en place ! Reprise d’études, multiples concours… j’ai tout réussi et ai eu une carrière fulgurante. Avant de me réveiller et de me révéler…
-As-tu des enfants?
Oui deux petites filles : 3 ans et demi et 6 ans. Leurs rayures sont déjà apparentes… cela promet!
-Quels sont tes centres d’intérêts?
Je suis curieuse de tout!
Je suis la caricature même de la HPI : demandez moi d’aller voir la météo sur internet et vous me retrouverez sur le site de la Nasa car entre temps je me serai demandée pourquoi déjà l’interaction de la lune joue à ce point sur tel ou tel phénomène physique).
J’aimerais tout savoir pour ma simple satisfaction personnelle et surtout avoir une connaissance la plus fine possible du fonctionnement complexe de notre monde. J’ai donc à peu près en permanence 50 livres à lire sur ma table de chevet, sur tous les thèmes possibles.
Je ne suis donc pas quelqu’un qui est faite de passion car je suis incapable de me consacrer de manière répétitive à la même activité.
Il faut sans arrêt que je sois dans la découverte.
Je pense que c’est pour cela aussi que j’aime tellement rencontrer des gens, car c’est à chaque fois d’autres histoires, d’autres parcours, d’autres caractères…
Et c’est pour cela aussi que je me passionne par l’impact de notre alimentation sur notre santé car cela se répercute sur tellement de choses ! Tant sur le fonctionnement du corps humain (qui me fascine), que sur notre environnement (qui me préoccupe énormément) que cela me pousse à découvrir sans arrêt de nouvelles choses.
-Tu es donc une adulte à haut potentiel, zèbre, surdouée, philocognitif, autant de termes qui désigne ce fonctionnement neuroatypique…
Comment l’as-tu découvert et quand?
J’ai ENFIN osé me faire bilanter en août 2019!
-Est-ce que tu t’en doutais?
Comme je te le disais en décrivant mon parcours scolaire, dès l’enfance j’ai bien compris que je n’étais pas du tout forgée de la même matière que le reste de mes camarades.
Au Primaire, j’ai beaucoup entendu le fait que j’étais une enfant précoce. Mais j’ai grandi avec cette idée, sans jamais oser franchir le pas pour en savoir plus et surtout mieux apprendre à connaitre mon fonctionnement.
Vers la vingtaine j’étais allée voir une psy dédiée aux « zèbres » mais je n’avais pas accroché, donc j’ai arrêté là ma démarche.
J’ai alors acheté un livre sur le sujet et là je me suis dit : ah ouais, ça me parle tout ça.
-Quel effet cette annonce a-t-elle eu sur toi? Tes proches?
Sur moi : la libération totale !
Ca y est, je sais qui je suis, je sais pourquoi je suis différente, je connais mes forces, mes faiblesses et maintenant j’avance avec tout ce package mais en étant bienveillante désormais avec moi-même et en arrêtant de me flageller en permanence!
Sur mes proches : pas de grosses surprises à leur niveau.
Mes parents avaient bien compris qu’ils avaient mis au monde un drôle de zébre et mon mari… avait aussi une idée dans quoi il s’était engagé en me disant oui)
-Qu’est-ce-que cela t’a apporté? Et pourquoi avoir décidé de te faire bilanter?
Maintenant j’ose faire des choix dans ma vie en fonction de mon côté « zèbre ».
Par exemple : j’assume désormais que mes amitiés sont sélectives. Je suis bien entourée mais peu. Je ne recherche plus que des personnes qui me font du bien. Oui j’adore les relations humaines, mais je suis très sélective en amitié.
Je déteste le bruit, j’ai besoin de beaucoup de calme quand j’ai été soumise à beaucoup de stumulations auditives ou visuelles. Je l’assume désormais etc etc…
J’ai décidé de me faire bilanter en 2019 car j’étais dans une démarche de développement personnel intense.
J’avais décidé de plaquer en 2017 ma carrière de fonctionnaire pour me révéler et arrêter de passer à côté de ma vie (sans pour autant savoir ce que j’allais faire…).
Mais j’ai écouté mon intuition. Et il fallait que j’aille jusqu’au bout de ma démarche et que je confirme cette hypothèse qui conditionne malgré tout un mode de fonctionnement différent.
-On parle souvent d’étiquettes quand on évoque ces sujets, qu’en penses-tu?
La société est construite ainsi, c’est dur de s’en défaire.
Le plus dur ce sont toutes les fausses idées associées : et que notamment en étant HPI, on est censés tout réussir et tout savoir, d’être des « grosses têtes ».
Alors que la clé, c’est que l’on a cette capacité incroyable d’interconnecter plein de sujets entre eux et de sortir facilement des sentiers battus, que l’on a une intuition très forte et on ressent et pressent les choses de manière forte.
On pourrait servir toute la société en apportant plein de nouvelles choses mais… il y a encore du chemin à parcourir.
-Es-tu d’accord avec le terme de haut potentiel ou as-tu une dénomination que tu trouverais plus adéquate? Qui te correspondrait mieux? Et pourquoi…
Moi je préfère le terme de « multipotentiel/le ».
C’est comme ça que je me définis. Car je suis en capacité de faire plein de choses, d’essayer plein de choses, de comprendre plein de choses… mais je ne suis pas Einstein en train de vivre seul dans ses sphères inatteignables. Et je m’éteins dès que vous me demandez de m’hyperspécialiser dans un domaine…
-Que penses-tu de notre vision en France par rapport aux profils atypiques, haut potentiel notamment?
Alors je t’avoue que je ne sais pas trop comment cela se passe dans les autres pays. Chouette, un nouveau sujet à creuser).
De mon point de vue, je pense qu’en France, c’est encore très compliqué pour les HPI de se faire une place au sein des entreprises.
Soit vous êtes hyper agile et vous arrivez à faire fi de beaucoup de choses (mais la question des valeurs finira par ressurgir vite un moment donné), soit vous trouvez un compromis où vous avez un job où on vous laisse gérer vos projets comme bon vous semble, soit… vous changez complètement de vie un moment donné car le système vous rend dingue.
Pour moi en tout cas, ce n’est clairement pas encore un atout utilisé par les entreprises.
La preuve, depuis que je suis entrepreneure… je n’ai jamais autant rencontré de profils atypiques…
Et sur le plan personnel, avant, je le cachais complètement, je me battais pour être comme les autres. Et maintenant, je l’assume et je fais le ménage en conséquence. Qui m’aime, me suive.
-Quels sont tes rêves?
Et plus concrètement tes projets?
Pendant longtemps mon rêve a été de sauver le monde, de le préserver de la catastrophe écologique en cours. Je me disais qu’avec mon cerveau en ébullition, mes 30 000 idées à la minute, cette mission était bien évidemment pour moi.
Une nouvelle Elon Musk.
Quand j’ai quitté le salariat, je voulais me vouer à cela.
Je me suis lancée dans plein de projets et rien n’avançait.
Un drame.
Et puis, j’ai travaillé sur moi-même et j’ai compris alors que ma sensibilité extrême ne me permettait pas d’être sur le devant de la scène à me prendre tous les coups. Donc je m’autosabotais en permanence.
Ce n’est pas ma mission de vie. Et maintenant je l’ai accepté.
Aujourd’hui, mon rêve est de construire … une vie qui me correspond à 300%, en accord avec mes valeurs profondes : respecter mon énorme besoin de liberté (c’est assez terrible à gérer pour mes proches car j’ai vraiment besoin de n’en faire qu’à ma tête…), avoir un travail qui me permet d’éveiller les consciences pour avoir de l’impact (c’est ma part de colibri), être dispo pour mes filles pour leur apporter une enfance joyeuse malgré tous les remous qu’elles doivent déjà traverser, pouvoir m’intéresser à plein de nouvelles choses, faire de nouvelles rencontres etc…
-Si c’était à refaire, y-a-t-il quelque chose que tu voudrais changer?
Ah oui !
Apprendre dès mon enfance à me connaître vraiment, et que l’on m’apprenne la bienveillance envers moi-même. J’aurais fait d’autres choix dans ma vie et aurais trouvé plus vite je pense la route qui me correspond.
-Aujourd’hui, qu’aimerais-tu transmettre?
Premier objectif : mes filles.
Leur apprendre à s’aimer telles qu’elles sont et surtout que leurs rayures de zèbres sont une force.
Et savoir utiliser leurs atouts pour rêver leur vie en grand.
Mais rêver sa vie en grand, c’est oser adapter sa vie à qui l’on est vraiment.
Ce n’est pas forcément finir au dernier étage d’une tour de Manhattan.
C’est juste se lever tous les matins en se disant que ce matin encore, cela vaut vraiment le coup d’ouvrir les yeux car on va vibrer!
Il existe les chemins tout tracés… et tout autour il y la clé des champs. Nous les atypiques sommes tous détenteurs de cette clé. Alors pourquoi s’en priver?
-Es-tu toujours la même qu’avant?
Non et encore heureux…. J’ai longtemps été très en colère, et c’était ça qui me guidait.
Et je me construisais en cherchant sans arrêt à me faire du mal, pour essayer d’être différente et être comme tout le monde. Maintenant je cherche à me faire du bien et à me préserver. Et maintenant je rêve ma vie en grand. »
Catégories : Témoignages

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